Interview exclusive - La vision de l'avenir d'Emmanuel Bekaert
2022/04/27

COMMENT VOYEZ-VOUS VOTRE CARRIÈRE, FERIEZ-VOUS LES CHOSES DIFFÉREMMENT ? Y A-T-IL DES CHOSES QUE VOUS REGRETTEZ ?
Emmanuel : "Je suis indépendant depuis 2008 et j'ai tout appris de manière systématique. J'ai beaucoup volé avec mes yeux et mes oreilles. Surtout, j'ai écouté les gens qui avaient de l'expérience et j'ai continué à faire des ajustements. Dès que j'entends une opportunité, l'entrepreneur en moi se réveille. Si c'était à refaire, je ne le ferais pas différemment.
Bekaert Technics a été un grand saut pour moi à l'époque. J'y ai investi toutes mes économies et ça passait ou ça cassait. C'était risqué, mais je me suis lancé. Au préalable, j'ai réalisé une étude de marché approfondie. À l'époque, il n'y avait pratiquement pas d'entreprises d'externalisation ; il y avait deux grands acteurs, mais un troisième pouvait certainement s'ajouter. Cela m'a donné la sécurité nécessaire pour oser me lancer. Après quelques années, j'ai vendu l'entreprise. Est-ce que je le regrette ? Oui, mais d'un autre côté, je ne le regrette pas. La vente m'a permis de rejoindre un grand groupe et j'ai beaucoup appris à cette occasion. J'ai apporté ces connaissances et cette expérience à Maxicon. Cela nous a permis d'arriver là où nous sommes aujourd'hui, Maxicon est en pleine croissance et prospère".
QUEL A ÉTÉ VOTRE AJUSTEMENT STRATÉGIQUE LE PLUS IMPORTANT ?
Emmanuel : "C'est la décision prise il y a un an et demi d'inclure Trui dans l'équipe de direction. Elle a commencé par diriger la division des domestiques Xellent. Je voyais Maxicon grandir et je ne pouvais plus la gérer seul en termes de ventes. Je suis quelqu'un qui aime entreprendre et qui a besoin d'espace pour le faire. Cela m'a permis de libérer de l'espace pour me concentrer sur de nouvelles entités. J'ai donc pris la décision de mettre quelqu'un à côté de Sophie et de moi. Aujourd'hui, comme Sophie, Trui est mon bras droit. Grâce à son expérience, j'étais convaincu qu'elle pouvait gérer à la fois les ventes et le recrutement. Cela m'a donné la liberté d'externaliser le suivi quotidien. Ce fut la décision la plus importante de ces six années et j'en suis toujours très heureux. Il faut toujours s'entourer des bonnes personnes et se rendre malheureux. J'ai récemment voyagé pendant une semaine, vous n'auriez pas dû me poser cette question auparavant. Je n'ai jamais été absent plus de quelques jours. Maintenant, je sais que l'entreprise est entre de bonnes mains et que les choses vont continuer à fonctionner. Même si je ne peux pas m'empêcher d'appeler tous les jours (rires). "
QUELS SONT LES FACTEURS QUI ONT PERMIS À MAXICON DE CONNAÎTRE UNE FORTE CROISSANCE CES DERNIÈRES ANNÉES ?
Emmanuel : "Ces dernières années, nous nous sommes lancés à corps perdu dans la numérisation et nous nous sommes préparés à la croissance. Plus on numérise, moins on a besoin de faire du travail répétitif (comme scanner, classer). Le temps libéré permet de se concentrer sur les tâches essentielles. Notre processus de numérisation a commencé par les bons de travail. Auparavant, nos employés les remplissaient sur papier et les apportaient au bureau chaque semaine. Aujourd'hui, ils peuvent facilement être transmis en ligne. De nombreux processus sont actuellement en cours d'élaboration. Nous travaillons notamment sur une plateforme d'automatisation des formulaires, un nouveau site web, le passage à un nouveau secrétariat social qui sera relié à notre progiciel de gestion intégré (ERP). Nous voulons rendre les choses aussi faciles que possible pour notre personnel.
Y A-T-IL ENCORE DE LA PLACE POUR LES RÊVES ET LES RISQUES AU SEIN DE MAXICON ?
Emmanuel : "Absolument. Il y a quelques semaines, un de ces rêves s'est concrétisé - une nouvelle entité. Technologix, des technologues qui se concentrent sur des technologies d'avenir telles que les bornes de recharge, l'énergie solaire, les réseaux de fibres optiques, etc. Bien sûr, je ne me lance pas dans quelque chose de nouveau comme ça. Une étude de marché l'a précédé pour déterminer notre valeur ajoutée et notre stratégie. Il y a certainement encore de la place au sein de Maxicon. J'attrape des choses et si j'y crois, j'essaie de les mettre en œuvre dans l'ADN de Maxicon".
AVEC TECHNOLOGIX DANS SA PHASE DE DÉMARRAGE, COMMENT VOYEZ-VOUS L'AVENIR ÉCONOMIQUEMENT ET TECHNOLOGIQUEMENT ?
Emmanuel : "J'ai déjà vécu deux crises économiques, nous sommes maintenant dans la troisième. J'ai créé Bekaert Technics pendant la crise financière de 2008. Je me suis frotté les cheveux pendant un certain temps, mais heureusement nous n'avons pas été touchés parce que nous étions une petite entreprise avec seulement quelques employés à l'époque. Avec Maxicon, nous avons résisté à l'effet corona, heureusement bien, et maintenant à la guerre en Ukraine. Pour l'instant, nous ne le ressentons pas encore, mais je suis sûr que la fin n'est pas encore en vue. Il s'agit d'une réaction en chaîne, il y a déjà une pénurie de matériel et cela va durer un certain temps. Peut-être que nos techniciens ne seront pas sollicités pendant un certain temps parce qu'il n'y a pas de matériel disponible, mais j'espère que ce sera temporaire. Nous sommes flexibles et nous nous concentrons désormais davantage sur l'industrie alimentaire, car ce secteur fonctionnera toujours. C'était également le cas lors du premier choc coronal. De cette manière, notre personnel peut rester au travail et nous pouvons nous prémunir contre la crise qui pourrait survenir. À mon avis, elle ne sera pas pire que la crise coronale. À l'époque, nous dépendions du facteur humain et de nombreuses entreprises ont dû fermer leurs portes. Aujourd'hui, il est encore possible de chercher d'autres fournisseurs de matières premières.
En ce qui concerne l'avenir de la technologie, nous sommes dans le bon secteur. Même les robots ont besoin d'être programmés et entretenus ; ils ne peuvent pas le faire tout seuls. Un robot n'est qu'une machine et peut tomber en panne, ce qui est précisément notre spécialité. Plus il y a d'automatisation, mieux c'est. Nous veillerons à ce que les machines fonctionnent et soient entretenues. Il faudra de plus en plus de techniciens pour faire face à la diminution du nombre de personnes dans la production. Tant chez Technix, Xellent que chez Retail & Logistix, je vois l'avenir en grand. Un robot qui réapprovisionne les rayons d'un magasin, cela semble difficile. Mais un jour, ce sera probablement possible si l'on regarde ce qui se fait aux États-Unis. Des magasins entièrement automatisés y existent déjà. Un badge enregistre ce que vous prenez dans les rayons et recharge aussi immédiatement tout votre caddie sans scanner manuellement. Mais je maintiens que le facteur humain sera encore nécessaire pendant un certain temps.
"Osez prendre des risques, ne continuez pas à rêver et faites de votre rêve une réalité. Entourez-vous des bonnes personnes et ne laissez pas votre ego vous empêcher de tout faire seul."
- Emmanuel Bekaert, directeur général
VOUS CONSIDÉREZ-VOUS COMME UN ENTREPRENEUR INTELLIGENT, POURQUOI/POURQUOI PAS ?
Emmanuel : "J'ose dire que je le suis, sinon je n'aurais pas plusieurs entreprises à mon nom aujourd'hui. Un véritable entrepreneur veut rester en activité. Je me vois comme un business angel : si je crois en une idée, je la soutiendrai en investissant. Pour une entreprise de portes et fenêtres, vous êtes à la mauvaise adresse avec moi : quelle est la valeur ajoutée parmi tous ces autres acteurs ? Pour me convaincre, il faut un concept innovant avec une valeur marchande. Il est très important pour moi d'être perçu comme qualitatif. Je constate également que dans toutes les entreprises que j'ai créées, la qualité et le service sont primordiaux. Nous ne recruterons pas un boulanger ou un boucher qui sait tenir une clé. Nous avons besoin de personnes capables de manier efficacement la clé et d'exceller dans leur métier, et c'est ainsi que nous nous différencions en tant que Maxicon. Cette vision est ancrée dans l'ADN et je la vois se refléter dans les responsables des ventes et des ressources humaines. Les personnes que nous envoyons sont notre carte de visite auprès des entreprises, nous sommes toujours conscients de l'importance de la publicité de bouche à oreille. Nos clients sont notre référence la plus importante.
QUELS SONT LES TRAITS DE CARACTÈRE IMPORTANTS POUR UN ENTREPRENEUR ?
Emmanuel : "En tant qu'entrepreneur, il ne faut pas se contenter d'être direct, il faut aussi se détourner de son objectif et envisager d'autres options. Dans une petite entreprise de 10 personnes, cela peut encore fonctionner, mais aujourd'hui, Maxicon est déjà considérée comme une grande entreprise, ce qui implique une certaine responsabilité. Il faut s'assurer que chacun a un travail et peut subvenir aux besoins de sa famille à la fin du mois. Mais aussi à l'égard du client, il est de notre responsabilité de placer la bonne personne au bon endroit. Nous nous assurons que la machine fonctionne et que les pannes sont résolues en un rien de temps.
Avant, j'étais très têtu, ma volonté faisait loi et j'avais toujours mes lunettes de cheval. Au fil des ans, j'ai changé, je suis plus disposé à écouter les autres. Si je suis toujours convaincue de mon idée après coup, je suivrai mon instinct, sinon non. Personne ne peut tout savoir, c'est pourquoi je m'entoure de personnes qui ont des connaissances et de l'expérience dans leur métier. Tant dans l'atelier que dans le conseil d'administration. C'est là que je trouve mon souffle et que nous apprenons les uns des autres, c'est ainsi que l'on s'enrichit en tant qu'entrepreneur. "
QUELLE EST VOTRE VISION DE L'ENTREPRISE DURABLE ?
Emmanuel : "La durabilité devient de plus en plus importante. Il y a quelques années, par exemple, nous avons choisi les véhicules au GNC comme l'un des rares. Aujourd'hui, nous nous concentrons principalement sur l'électrification de nos véhicules et nous sommes en mesure de mettre en service des panneaux solaires et des stations de recharge supplémentaires. Il existe déjà des acteurs majeurs qui établissent une charte avec des conditions dans le cadre d'une activité durable (par exemple, la valeur de l'EPB, le traitement des déchets). Nous ne sommes pas une entreprise manufacturière, c'est donc un peu plus difficile pour nous, mais nous faisons ce que nous pouvons pour être aussi durables que possible en tant qu'entreprise".
EN TANT QU'ENTREPRENEUR PROSPÈRE, JOUEZ-VOUS EN BOURSE ? EST-CE INDISPENSABLE POUR AVOIR UNE IDÉE DE L'ÉCONOMIE ?
Emmanuel : "J'ai appris à jouer en bourse pendant le premier lockdown, il n'y a donc pas si longtemps. J'avais des océans de temps et je cherchais quelque chose de nouveau, c'est comme ça que j'ai fini par la bourse. Bien sûr, avec des risques calculés. (rires) Lors de la crise de la Corona, beaucoup d'actions ont chuté, ce qui était le moment idéal pour entrer sur le marché. C'est là que mon flair pour les affaires s'est à nouveau révélé utile. Aujourd'hui encore, je commence ma journée en regardant le cours de l'action à 9 heures du matin, un moment passionnant chaque jour. Je regrette de ne pas avoir commencé plus tôt. Entre-temps, j'ai également recommandé ce projet à plusieurs amis et nous avons créé un groupe whatsapp pour spéculer à foison. Certains font des études financières élaborées, c'est comme ça qu'on apprend les uns des autres. Je souhaite certainement cela à tous les entrepreneurs, évidemment avec un pot d'épargne que vous avez en surplus".
"Maxicon comme une tache d'encre sur la carte de la Belgique, c'est mon rêve.
- Emmanuel Bekaert, directeur général
QUEL EST VOTRE DERNIER CONSEIL SUR LA VOIE DU SUCCÈS ?
Emmanuel : "J'en ai plusieurs. Osez prendre des risques, ne continuez pas à rêver et faites de votre rêve une réalité. Entourez-vous des bonnes personnes et ne laissez pas votre ego vous empêcher de tout faire seul. En particulier sur le plan numérique, vous devez être fort en tant qu'entrepreneur. Vous ne pouvez pas vous lancer sans avoir défini votre stratégie de prix. Commencez par calculer et faites vos devoirs dès le premier jour. Il n'y a pas de questions stupides et il faut suivre les bons conseils.
COMMENT GARANTIR LE SUCCÈS À LONG TERME D'UN ENTREPRENEUR ?
Emmanuel : "Travaillez par étapes, ne voulez pas tout avoir en même temps. J'aurais pu commencer immédiatement avec 200 employés, mais j'aurais alors dû embaucher tous ceux qui arrivaient ou qui connaissaient quelque chose à la technologie. Gardez votre vision future à l'esprit à chaque étape. Pour moi, il s'agissait d'assurer la qualité et le service à nos clients, et c'est ainsi que nous avons systématiquement développé nos activités et notre approche. On ne peut pas non plus atteindre le sommet d'une start-up sans capital, il faut que le pain soit sur la table tous les mois. Il faut aussi un soutien suffisant de la part des bureaux qui peuvent gérer le personnel. Ma vision était différente, à l'époque nous étions avec un petit groupe et je voulais en tirer le maximum. Mais il faut veiller à ne pas brûler son personnel, je l'ai appris depuis. Il vaut mieux faire un peu moins de bénéfices, mais travailler avec des collaborateurs plus heureux. Chacun doit faire ce qu'il sait faire, ce qu'il aime faire et ce dans quoi il peut se spécialiser.
QUE RECOMMANDERIEZ-VOUS À D'AUTRES JEUNES ENTREPRENEURS ?
Emmanuel : "L'esprit d'entreprise est en vous. Être indépendant ne signifie pas automatiquement être entrepreneur. J'y crois et je veux travailler beaucoup pour cela, c'est le point de départ. Lorsque j'ai commencé chez Bekaert Technics, j'allais encore bricoler moi-même tous les samedis et dimanches à partir de 5 heures du matin. Les clients doivent pouvoir constater que vous savez de quoi vous parlez. Veillez d'abord à acquérir suffisamment de connaissances sur votre produit ou service. Pour ma part, je n'ai pas commencé à faire des affaires très jeune, mais seulement en 2008. Je suis parti de zéro et j'ai travaillé seul pour réunir mon capital. C'est ainsi que j'ai acquis de l'expérience et que j'ai pu créer une entreprise sans prêt bancaire. Je suis parfois effrayé par le fait que les jeunes reçoivent un capital de départ de leurs parents et peuvent démarrer quelque chose à partir de rien. J'ai travaillé dur pour y arriver, sans soutien financier de la part de mon père ou de ma mère. Qui sait, j'aurais peut-être commencé plus tôt, mais je peux dire aujourd'hui que je ne dois rien à personne. J'ai eu l'occasion de frapper le mur parce que c'était mon propre argent".
A QUOI RESSEMBLERA MAXICON DANS CINQ ANS ?
Emmanuel : "Maxicon est une tache d'encre sur la carte de la Belgique. Aujourd'hui, il y a Roeselare, Genk, Landegem, auxquels j'aimerais ajouter Anvers et la Wallonie. D'ici cinq ans, nous aurons une équipe de 400 personnes, toutes divisions confondues. Mon rêve est de faire une acquisition un jour, et nous ne resterons pas non plus inactifs au niveau du holding. Absolute Jobs continuera également à se développer, tout comme Maxicon. À court terme, nous aurons besoin d'une personne au sein du groupe AM pour stimuler et soutenir la croissance. Quelqu'un pour lancer et surveiller de nouveaux créneaux dans le domaine des ressources humaines. Notre rêve ultime en tant que groupe AM : une entreprise de cent millions d'euros. Aujourd'hui, nous en sommes à 60 % et je vois cela de manière réaliste d'ici cinq ans, si tout va bien. Mais pour cela, nous avons besoin d'une main-d'œuvre supplémentaire pour coordonner. Si nous pouvons nous développer grâce à des acquisitions, à notre équipe actuelle et aux bonnes personnes au bon endroit, j'y crois à 100 %."